Source : https://www.corsicamea.fr/coutumes/maison.htm
Bien que les villages Corses soient constitués de plusieurs petits hameaux, généralement érigés sur la ligne de crêtes des collines pour des raisons compréhensibles de sécurité, la population y était nombreuse en ce temps là.
Plus que modeste, la maison, dont le premier niveau en terre battue est réservé pour une partie -l’autre partie servant de cave- aux animaux domestiques (poules, chèvres, lapins, mule ou âne), possède deux ou trois étages dans lesquels logent parents, enfants et petits enfants.
Dans cette communauté l’esprit de famille prend tout son sens. Bien que la maison paraisse immense, elle ne se compose bien souvent que d’une pièce principale dans laquelle prône l’immense fucone dont la fumée est censée s’évacuer par le plafond fait de lattes de bois sur lesquels sont mises en hiver les châtaignes à sécher.
On s’éclaire à l’aide d’une torche de bois gras, à dedda et l’on vit parfois à l’étroit. Les enfants dorment à plusieurs dans le même lit dont le matelas est confectionné avec des feuilles de maïs (le chanvre ne sera utilisé que plus tard).
Le père de famille, u patrone, reste le maître en toutes circonstances. A sa mort, selon la tradition, la maison reviendra à l’aîné de ses fils. Dans une famille Corse, il est important d’avoir une nombreuse famille constituée surtout de garçons; d’abord parce que ces derniers constitueront une main d’oeuvre nécessaire pour les travaux des champs et ensuite parce qu’ils doivent assurer la continuité généalogique, perpétuer le nom de famille et garder intacte la propriété familiale considérée comme « logu di raportu ». Les filles, de leur côté, hériteront systématiquement de la propriété de la plaine.
Pendant que l’homme part le matin à l’aube pour s’occuper des animaux et vaquer aux divers travaux saisonniers, la femme (a patrona) entretient la maison, élève les enfants avec autorité, s’occupe du jardin potager et de l’arrosage, participe aux travaux des champs et aux nombreuses cueillettes (celle des châtaignes étant la plus importante). Elle va chercher l’eau à la fontaine, pétrit le pain, etc… C’est elle, quand le mari est absent, qui remet symboliquement la clé de la maison à celle que son fils aura choisi pour épouse et qui habitera désormais sous son toit, c’est elle que son époux consulte pour les décisions importantes, c’est elle aussi -les exemples sont nombreux- qui sera capable de prendre les armes en cas de nécessité.
La maison Corse, surtout dans les villages, a l’âme hospitalière; savoir recevoir est plus qu’un devoir, c’est une règle d’or. Quand un « furesteru » (étranger) arrive au village, chaque famille se dispute l’honneur de l’avoir à sa table. Il sera reçu pour l’occasion, in salottu (au salon) et fera l’objet de toutes les attentions.
Je me souviens, que l’étranger ou le parent qui arrivait chez grand mère ne franchissait jamais le premier étage car les autres pièces de la maison étaient exclusivement réservées à la famille. Ces autres pièces étaient : -au rez-de-chaussée, u palmentu (la cave) que l’on nommait aussi cantina, dans laquelle on rangeait le vin et le fromage de la propriété familiale, – au premier étage, auquel on accédait par un escalier aux marches recouvertes d’ardoise, il avait trois chambres (stanze) et le salon (salottu) – au deuxième étage identiquement agencé au premier, se trouvaient encore trois chambres et la salle principale (sala) qui était la pièce à vivre.
Dans cette pièce où j’ai vécu en compagnie de grand-père tant de veillées inoubliables, je revois le grand fucone, élément indispensable au séchage des châtaignes et de la charcuterie, u carminu (la cheminée), u cascione dans lequel on rangeait les ustensiles de cuisine et les provisions, a meria ou media (le pétrin) où l’on conservait le pain pour la semaine, u bancale (un grand banc de chataîgnier avec un dossier) et dans un renfoncement du mur, masqué par deux portes en bois, a scanceria dans laquelle on rangeait aussi les provisions et parfois le chocolat auquel je rêvais avec envie, – enfin au dernier étage a rate (le grenier) fait de lattes de châtaignier grossièrement taillées, entièrement noircies par la fumée et disposées à claire-voie, sur lesquelles on étalait les châtaignes que le fucone faisait sécher au fil des jours.
A meria ou media (le pétrin)
U bancale (un grand banc de chataîgnier avec un dossier)